En entrant dans Noyant, le visiteur peut avoir la sensation d'être projeté à plus de 5.000 kilomètres de la France, en direction de l'Est, en plein cœur du Viêtnam. Les vêtements, la nourriture, le culte, tous les éléments culturels asiatiques sont regroupés dans ce petit village, grâce à la moitié de la population originaire du Viêt-Nam.

Une ode à l'acceptation mutuelle

L'histoire plutôt insolite de Noyant commence en 1954 avec la chute de Diên Biên Phuh. Les troupes françaises d'Indochine doivent alors se replier. La France est battue. Le gouvernement de Mendès-France ne pouvant plus reculer, signe, deux mois plus tard, les accords de Genève.  L'Indochine n'est plus et cède la place aux deux Viêtnam qui, l'un comme l'autre, n'ont que faire des anciens colons.

La fuite des Français doit donc s'organiser, y compris en direction de la mère Patrie. Le destin de Noyant croise alors cet épisode de l'histoire de la France lorsque durant l'hiver 1955, ce petit village voit débarquer plusieurs centaines de Français rapatriés d'Indochine.
Noyant, petite commune du bassin de la Queune, loin du conflit et des morts, est à cette époque, un village déserté par les mineurs. La crise économique est vive et la petite commune se meurt lentement. Les Noyantais sont donc prêts à recevoir en masse ces citoyens français aux yeux bridés, à la peau mate.
Descendants de Français de souche, mariés à des vietnamiennes, ils se nomment Gouchard ou Martini et n'ont jamais vu la France. Il vont alors devoir s'acclimater au pays et reconstruire une vie nouvelle, loin de Saïgon, d'Hanoï ou de la baie d'Along. Placés dans un centre d'accueil dès leur arrivée, ils deviennent rapidement propriétaire d'une petite maison dans la cité des Corons, et, peu à peu, les " chinois " de Noyant passent de l'objet de curiosité au statut de citoyen.

Pha'p Vüong Thu : village vietnamien de Noyant

Pha'p Vüong Thu - Village vietnamien de Noyant d'Allier
Aujourd'hui, la communauté vietnamienne vit toujours à Noyant et même si leurs enfants sont partis à Paris, Clermont-Ferrand ou Lyon, elle constitue encore la moitié de la population du village. Le quartier des mineurs est devenu la Cité de la Brosse. Les façades ont été refaites et, voici bientôt vingt ans, une pagode et son fameux Boudha ont été érigés.
Un Bouddha gigantesque, de plusieurs mètres de haut, trône désormais en bordure des habitations, entre les près si caractéristiques du bocage bourbonnais et l'ancienne mine. Une construction insolite qui, près de cinquante ans après l'arrivée des réfugiés se dresse comme une formidable preuve d'acceptation mutuelle.
L'ancien Noyant a su s'adapter aux nouveaux arrivants et ces derniers ont redonné un certain dynamisme à la commune. Ce village de 900 habitants abrite désormais un restaurant et une boutique exclusivement réservés aux produits asiatiques, deux lieux deux cultes situés à un kilomètres de distance à peine ( église et pagode ), des inscriptions en français et en vietnamien sur certains bâtiments publics.
Un mélange s'est donc installé ici, en plein Bourbonnais. Ici, tout le monde se connaît et se rencontre autour d'un plat de nems arrosées d'un " bon vieux " Saint-Pourçain !